ROUTE e69

Bien avant l’avènement de la photographie numérique, au temps de l’argentique, avant de songer à la photographie, j’étais déjà maître dans l’art du rêve éveillé. Ça n’a pas changé. Malgré moi, sans vraiment le vouloir, ce sont des rêveurs du genre de Josef Sudek, Klavdij Sluban, Soulage ou Charles Baudelaire ou autres poètes, qui m’inspirent encore.

Je ne vais pas vous parler photo aujourd’hui mais lecture et surtout voyage.

Pendant des années je me suis nourri des livres de Saint-Exupéry, Jean-Louis Étienne et bien d’autres. Lisant les récits des expéditions polaires de R. Admunsen, Scott ou Fridtjofd Nansen. Ces aventuriers m’ont donné des envies et des idées de voyages.

Et si… ? Tout en étant conscient de mes limites et contraintes et en sachant très bien que je n’avais pas l’envergure de ces hommes ni leurs talents… j’aurais voulu les imiter… songes éveillé.

Hémiplégique dès l’âge de 18 ans, âge où décidément, on ne peut se résoudre à rester immobile, mon envie de vivre était restée entière, elle. Après quelques voyages d’échauffement et quinze ans de plus, je suis parti pour un voyage de Montpellier vers Cap Nord, en trains, bateaux et bus. Lentement, en solitaire et avec mes séquelles. Cherchant à voyager autrement et loin des circuits imposés par les agences touristiques. Dans le voyage, ce n’est pas la destination qui compte, mais la route que l’on parcourt. J’ai au moins appris ça.

Envie d’aller plus loin sur ce globe et plus loin dans ma solitude et l’effort. Sauvage comme je le suis, je suis parti à la rencontre du monde et c’est moi que j’ai croisé.

Le petit livre Route E69 (122 pages) est le récit de ce voyage au Cap-Nord. Ce n’est pas un livre de plus sur l’exploit d’une personne handicapée (ce n’est d’ailleurs pas un exploit). Même si j’y parle de mes difficultés parce qu’elles font partie de moi H24 depuis près de quarante ans, c’est avant tout une histoire, une aventure, la mienne, tirée de mon journal de voyage.

Route E69 n’est pas un livre de photographies. A l’époque je m’intéressais peu à la photo, encore argentique et par conséquent chère. Mais le livre en contient quelques unes, des moments ou paysages qui m’ont marqué.

J’ai envie de m’arrêter à Mo I Rana, un petit village à 70 kilomètres au sud du cercle polaire. Avec un prénom pareil cette ville doit sûrement cacher des trésors ! Mo I Rana, rien que de le prononcer, ça dépayse, ça transporte ailleurs. Un prénom étrange au milieu de paysages étranges. Mo I Rana, c’est loin, très loin de Pouzols et de ma vie de tous les jours…

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